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Droit et Justice - Page 2

  • --- Extrait du discours préliminaire sur le projet de Code Civil de PORTALIS ---

    Portalis

    Discours préliminaire sur le projet de code civil

    ( extrait de ce discours, présenté le 1er pluviôse an IX )

    Les lois ne sont pas de purs actes de puissance ; ce sont des actes de sagesse, de justice et de raison. Le législateur exerce moins une autorité qu’un sacerdoce. Il ne doit point perdre de vue que les lois sont faites pour les hommes, et non les hommes pour les lois ; qu’elles doivent être adaptées au caractère, aux habitudes, à la situation du peuple pour lequel elles sont faites : qu’il faut être sobre de nouveautés en matière de législation, parce que sil est possible, dans une institution nouvelle, de calculer les avantages que la théorie nous offre, il ne l’est pas de connaître tous les inconvénients que la pratique seule peut découvrir ; qu’il faut laisser le bien, si on est en doute du mieux ; qu’en corrigeant un abus, il faut encore voir les dangers de la correction même ; qu’il serait absurde de se livrer à des idées absolues de perfection, dans des choses qui ne sont susceptibles que d’une bonté relative ; qu’au lieu de changer les lois, il est presque toujours plus utile de présenter aux citoyens de nouveaux motifs de les aimer ; que l’histoire nous offre-à peine la promulgation de deux ou trois bonnes lois dans l’espace de plusieurs siècles ; qu’enfin, il n’appartient de proposer des changements qu’à ceux qui sont assez heureusement nés pour pénétrer d’un coup de génie et par une sorte d’illumination soudaine, toute la constitution d’un État.

    A l’ouverture de nos conférences. nous avons été frappés de l’opinion, si généralement répandue, que, dans la rédaction d’un code civil, quelques textes bien précis sur chaque matière peuvent suffire, et que le grand art est de tout simplifier en prévoyant tout.

    Tout simplifier est une opération sui laquelle on a besoin de s’entendre. Tout prévoir est un but qu’il est impossible d’atteindre.

    Il ne faut point de lois inutiles ; elles affaibliraient les lois nécessaires ; elles compro­mettraient- la certitude et la majesté de la législation. Mais un grand État comme la France, qui est à la fois agricole et commerçant, qui renferme tant de professions différentes, et qui offre tant de genres divers d’industrie, ne saurait comporter des lois aussi simples que celles d’une société pauvre ou plus réduite.

    Dans les états despotiques, où le prince est propriétaire de tout le territoire, où tout le commerce se fait au nom du chef de l’État et à son profit, où les particuliers n’ont ni liberté, ni volonté, ni propriété, il y a plus de juges et de bourreaux que de lois ; mais partout où les citoyens ont des biens à conserver et à défendre, partout où ils ont des droits politiques et civils, partout où l’honneur est compté pour quelque chose, il faut nécessairement un certain nombre de lois pour faire face à tout. Les diverses espèces de biens, les divers genres d’industrie, les diverses situations de la vie humaine, demandent des règles différentes. La sollicitude du législateur est obligée de se proportionner à la multiplicité et à l’importance des objets sur lesquels il faut statuer. De là. dans les codes des nations policées, cette prévoyance scrupuleuse qui multiplie les cas particuliers, et semble faire un art de la raison même.

    Nous n’avons donc pas cru devoir simplifier les lois au point de laisser les citoyens sans règnes et sans garantie sur leurs plus grands intérêts.

    Nous nous sommes également préservés de la dangereuse ambition de vouloir tout régler et tout prévoir. Qui pourrait penser que ce sont ceux mêmes auxquels un code paraît toujours trop volumineux, qui osent prescrire impérieusement au législateur la terrible tâche de ne rien abandonner à la décision du juge ?

    Quoi que l’on fasse, les lois positives ne sauraient jamais entièrement remplacer l’usage de la raison naturelle dans les affaires de la vie. Les besoins de la société sont si variés, la communication des hommes est si active, leurs intérêts sont si multipliés et leurs rapports si étendus, qu’il est impossible au législateur de pourvoir à tout.

    Dans les matières mêmes qui fixent particulièrement son attention, il est une foule de détails qui lui échappent, ou qui sont trop contentieux et trop mobiles pour pouvoir devenir l’objet d’un texte de loi.

    D’ailleurs, comment enchaîner l’action du temps ? Comment s’opposer au cours des événements ou à la pente insensible des mœurs ? Comment connaître et calculer d’avance ce que l’expérience seule peut nous révéler ? La prévoyance peut-elle jamais s’étendre à des objets que la pensée ne peut atteindre ?

    Un code, quelque complet qu’il puisse paraître, n’est pas plutôt achevé, que mille questions inattendues viennent s’offrir au magistrat. Car les lois, une fois rédigées, demeurent telles quelles ont été écrites ; les hommes , au contraire, ne se reposent jamais ; ils agissent toujours ; et ce mouvement, qui ne s’arrête pas, et dont les effets sont diversement modifiés par les circonstances, produit à chaque instant quelque combinaison nouvelle, quelque nouveau fait, quelque résultat nouveau.

    Une foule de choses sont donc nécessairement abandonnées à l’empire de l’usage, à la discussion des hommes instruits, à l’arbitrage des juges.

    L’office de la loi est de fixer, par de grandes vues, les maximes générales du droit ; d’établir des principes féconds en conséquences, et non de descendre dans le détail des questions qui peuvent naître sur chaque matière.

    C’est au magistrat et au jurisconsulte, pénétrés de l’esprit général des lois, à en diriger l’application.

    De là, chez toutes les nations policées, on voit toujours se former, à côté du sanctuaire des lois, et sous la surveillance du législateur. un dépôt de maximes, de décisions et de doctrines qui s’épure journellement par la pratique et par le choc des débats judiciaires, qui s’accroît sans cesse de toutes les connaissances acquises, et qui a constamment été regardé comme le vrai supplément de la législation.

    On fait à ceux qui professent la jurisprudence le reproche d’avoir multiplié les subtilités, les compilations et les commentaires. Ce reproche peut être fondé. Mais dans quel art, dans quelle science ne s’est-on pas exposé à le mériter ? Doit-on accuser urne classe particulière d’hommes de ce qui n’est qu’une maladie générale de l’esprit ? Il est des temps où l’on est condamné à l’ignorance parce qu’on manque de livres ; il en est d’autres où il est difficile de s’instruire parce qu’on en a trop.

    Si l’on peut pardonner à l’intempérance de commenter, de discuter et d’écrire, c’est surtout en jurisprudence. On n’hésitera point à le croire, si l’on réfléchit sur les fils innombrables qui lient les citoyens, sur le développement et la progression successive des objets dont le magistrat et le jurisconsulte sont obligés de s’occuper, sur le cours des événements et des circonstances qui modifient de tant de manières les relations sociales ; enfin sur l’action et la réaction continue de toutes les passions et de tous les intérêts divers. Tel blâme les subtilités et les commentaires, qui devient, dans une cause personnelle, le commentateur le plus subtil et le plus fastidieux.

    Il serait sans doute désirable que toutes les matières pussent être réglées par des lois.

    Mais à défaut de texte précis sur chaque matière. un usage ancien, constant et bien établi, une suite non interrompue de décisions semblables, une opinion ou une maxime reçue, tiennent lieu de la loi. Quand on n’est dirigé par rien de ce qui est établi ou connu, quand il s’agit d’un fait absolument nouveau, on remonte aux principes du droit naturel. Car si la prévoyance du législateur est limitée, la nature est infinie ; elle s’applique à tout ce qui peut intéresser les hommes.

    Tout cela suppose des compilations, des recueils, des traités, de nombreux volumes de recherches et de dissertations.

    Le peuple, dit-on, ne peut dans ce dédale démêler ce qu’il doit éviter où ce qu’il doit faire pour avoir la sûreté de ses possessions et de ses droits.

    Mais le code même le plus simple serait-il à la portée de toutes les classes de la société ? Les passions ne seraient-elles pas perpétuellement occupées à en détourner le vrai sens ? Ne faut-il pas une certaine expérience pour faire une sage application des lois ? Quelle est d’ailleurs la nation à laquelle des lois simples et en petit nombre aient longtemps suffi ?

    Ce serait donc une erreur de penser qu’il pût exister un corps de lois qui eût d’avance pourvu à tous les cas possibles, et qui cependant fût à la -portée du moindre citoyen.

    Dans l’état de nos sociétés, iL est trop heureux que la jurisprudence forme une science qui puisse fixer le talent, flatter l’amour-propre et réveiller l’émulation. Une classe entière d’hommes se voue dès lors à cette science, et cette classe, consacrée à l’étude des lois, offre des conseils et des défenseurs aux citoyens qui ne pourraient se diriger et se défendre eux-mêmes, et devient comme le séminaire de la magistrature.

    Il est trop heureux qu’il, y ait des recueils et une tradition suivie d’usages, de maximes et de règles, pour qu’il y ait en quelque sorte nécessité de juger aujourd’hui comme on a jugé hier, et qu’il. n’y ait d’autres variation dans -les jugements publics, que celles qui sont amenées par le progrès des lumières et par la force des circonstances.

    Il est trop heureux que la nécessité on est le juge de s’instruire, de faire des recherches, d’approfondir les questions qui s’offrent à lui, ne lui permette jamais d’oublier que, s’il est des choses qui sont arbitraires à sa raison, il n en est point qui soient purement à son caprice ou à sa volonté.

    En Turquie, où la jurisprudence n’est point un art, où 1e bacha peut prononcer comme il la veut, quand des ordres supérieurs ne le gênent pas, on voit les justiciables ne demander et recevoir justice qu’avec effroi. Pourquoi n’a-t-on pas les mêmes inquiétudes auprès de nos juges ? C’est qu’ils sont rompus aux affaires, qu’ils ont des lumières, des connaissances, et qu’ils se croient sans cesse obligés de consulter celles des autres. On ne saurait comprendre combien cette habitude de science et de raison adoucit et règle le pouvoir.

    Pour combattre l’autorité que nous reconnaissons dans les juges, de statuer sur les choses qui ne sont pas déterminées par les lois, on invoque le droit qu’a tout citoyen de n’être jugé que d’après une loi antérieure et constante.

    Ce droit ne peut être méconnu. Mais, pour son application, il faut distinguer les matières criminelles d’avec les matières civiles.

    Les matières criminelles. qui ne roulent que sur certaines actions, sont circonscrites : les maures civiles ne le sont pas. Elles embrassent indéfiniment toutes les actions et tous les intérêts compliqués et variables qui peuvent devenir un objet de litige entre des hommes vivant en société. Conséquemment, les matières criminelles peuvent devenir l’objet d’une prévoyance dont les matières civiles ne sont pas susceptibles.

    En second lieu, dans les matières civiles. le débat existe toujours entre deux ou plusieurs citoyens. Une question de propriété, ou toute autre question semblable ne peut rester indécise entre eux. On est forcé de prononcer ; de quelque ‘manière que ce soit, il faut terminer le litige. Si les parties ne peuvent pas: accorder elles-mêmes, que fait alors L’État ? Dans l’impossibilité de leur donner des lois sur tous les objets, il leur offre, dans le magistrat public, un arbitre éclairé et impartial dont la décision les empêche d’en venir aux mains, et leur est certainement plus profitable qu’un litige prolongé, dont elles ne pourraient prévoir ni les suites ni le terme. L’arbitre apparent de l’équité vaut encore mieux que le tumulte des passions.

    Mais dans les matières criminelles, le débat est entre le citoyen et le public. La volonté du public ne peut être représentée que par celle de la loi-Le citoyen dont les actions ne violent point la loi, ne saurait donc être inquiété ni accusé au nom du public. Non seulement alors on n’est pas forcé de juger, mais il n’y aurait pas même matière à jugement.

    La loi qui sert de titre à l’accusation doit être antérieure à l’action pour laquelle on accuse. Le législateur ne doit point frapper sans avertir : s’il en était autrement, la loi, contre son objet essentiel, ne se proposerait donc pas de rendre les hommes meilleurs, mais seulement de les rendre plus malheureux, ce qui serait contraire à l’essence même des choses.

    Ainsi, en matière criminelle, où il n’y a qu’un texte formel et préexistant qui puisse fonder l’action du juge, il faut des lois précises et point de jurisprudence. Il en est autrement en matière civile : là, il faut une jurisprudence, parce qu’il est impossible de régler tous les objets civils par des lois, et qu’il est nécessaire de. terminer, entre particuliers, des contestations qu’on ne pourrait laisser indécises, sans forcer chaque citoyen à devenir juge dans sa propre cause, et sans oublier que la justice est la première dette de la souveraineté.

    Sur le fondement de la maxime que les juges doivent obéir aux lois, et qu’il leur est défendu de les interpréter, les tribunaux, dans ces dernières années, renvoyaient par des référés les justiciables au pouvoir législatif, toutes les fois qu’ils manquaient de loi, ou que la loi existante leur paraissait obscure. Le tribunal de cassation a constamment réprimé cet abus comme un déni de justice.

    Il est deux sortes d’interprétations : l’une par voie de doctrine, et l’autre par voie d’autorité.

    L’interprétation par voie de doctrine, consiste à saisir le vrai sens des lois, à les appliquer avec discernement, et à les suppléer dans les cas qu’elles n’ont pas réglés. Sans cette espèce d’interprétation pourrait-on concevoir la possibilité de remplir l’office de juge ?

    L’interprétation par la voie d’autorité consiste à résoudre les questions et les doutes par la voie de règlements ou de dispositions générales. Ce mode d’interprétation est le seul qui soit interdit au juge.

    Quand la loi est claire, il faut la suivre ; quand elle est obscure, il faut en approfondir les dispositions. Si l’on manque de loi, il faut consulter l’usage ou l’équité. L’équité est le retour à la loi naturelle, dans le silence, l’opposition ou l’obscurité des lois positives.

    Forcer le magistrat de recourir au législateur, ce serait admettre le plus funeste des principes ; ce serait renouveler parmi nous la désastreuse législation des rescrits ; car, lorsque le législateur intervient pour prononcer sur des affaires nées et vivement agitées entre particuliers, il n est pas plus à l’abri des surprises que les tribunaux. On a moins à redouter l’arbitraire réglé timide et circonspect d’un magistrat qui peut être réformé, et qui est soumis à l’action en forfaiture, que l’arbitraire absolu d’un pouvoir indépendant qui n’est jamais responsable.

    Les parties qui traitent entre elles sur une matière que la loi positive n’a pas définie, se soumettent aux usages reçus ou à l’équité universelle, à défaut de tout usage. Or, constater un point d’usage et l’appliquer à une contestation privée, c’est faire un acte judiciaire et non un acte législatif. L’application même de cette équité ou de cette justice distributive, qui suit et qui doit suivre, dans chaque cas particulier, tous les petits fils par lesquels une des parties litigantes tient à l’autre, ne peut jamais appartenir au législateur, uniquement ministre de cette justice ou de cette équité générale, qui, sans égard à aucune circonstance particulière, embrasse l’universalité des choses et des personnes. Des lois intervenues sur des affaires privées seraient donc souvent suites de partialité, et toujours elles seraient rétroactives et injustes pour ceux dont le litige aurait précédé l’intervention de ces lois.

    De plus, le recours au législateur entraînerait des longueurs fatales au justiciable, et, ce qui est pire, il compromettrait la sagesse et la sainteté des lois.

    En effet, la loi statue sur tous : elle considère les hommes en masse, jamais comme particuliers ; elle ne doit. point se mêler des faits individuels ni des litiges qui divisent les citoyens. S’il en était autrement, il faudrait journellement faire de nouvelles lois ; leur multitude étoufferait leur dignité et-nuirait à leur observation. Le jurisconsulte serait sans fonctions et le législateur, entraîné par les détails, ne serait bientôt plus que jurisconsulte. Les intérêts particuliers assiégeraient la puissance législative ; ils la détourneraient, à chaque instant, de l’intérêt général de la société.

    Il y a une science pour les législateurs, comme il y en a une pour les magistrats; et l’une ne ressemble pas à l’autre. La science du législateur consiste à trouver, dans chaque matière, les principes les plus favorables au bien commun ; la science du magistrat est de mettre ces principes en action, de les ramifier, de les étendre, par une application sage- et raisonnée, aux hypothèses privées ; d’étudier 1’esprit de la loi –quand la lettre tue, et de ne pas s’exposer à être tour à tour esclave et rebelle, et à désobéir par esprit de servitude.

    Il faut que le législateur veille sur la jurisprudence : il peut être éclairé par elle, et il peut, de son coté, la corriger ; mais il faut qui il y en ait-une. Dans cette immensité d’objets divers, qui composent les matières civiles, et dont le jugement, dans le plus grand nombre de cas, est moins l’application d’un texte précis, que la-combinaison de plusieurs textes qui conduisent à la décision bien plus qu’ils ne la renferment, on ne peut pas plus se passer de jurisprudence que des lois. Or, c est à la jurisprudence que nous abandonnons les cas rares et extraordinaires qui ne sauraient entrer dans le plan d’une législation raisonnable, les détails trop variables et trop contentieux qui ne doivent point occuper le législateur, et tous les objets que l’on s’efforcerait inutilement de prévoir, ou qu’une prévoyance précipitée ne pourrait définir sans danger. C’est à l’expérience à combler successivement les vides que nous laissons. Les codes de peuples se font avec le temps ; mais, à proprement parler, on ne les fait pas.   

     

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    Extrait d’un discours de Portalis (1746-1807). Philosophe, orateur et jurisconsulte, il participe à la rédaction du Code Napoléon. 

    Dans cet extrait, Portalis permet d’explorer plusieurs observations importantes en relation avec l’écriture d’un Code, soit un recueil de lois :

    -          Le pouvoir évolue –change, mais les lois demeurent.

    -          Il explique les raisons d’un besoin d’une législation uniforme, rappelant qu’il faut nécessairement un certain nombre de lois pour faire face à tout, d’où la diversité de ces lois. Il n’est pas possible de laisser les citoyens sans règles. Les lois sont donc favorables aux individus. Nécessité de stabilité, malgré l’esprit révolutionnaire.  

    -          Mais surtout, il intervient sur la réalité d’une telle rédaction : tout simplifier (s’entendre dessus)… tout prévoir (impossible à atteindre)… sachant qu’il ne faut point de lois inutiles puisqu’elles affaibliraient les lois nécessaires.

    -          Cette rédaction doit donc trouver un juste équilibre : on ne peut pas laisser les citoyens sans règle mais on ne peut pas vouloir tout régler.

    -          Il souligne qu’il est impossible de tout régler, en raison même de l’évolution de la société ; des foules de détails qui seraient nécessaires et rapidement obsolètes.

    -          S’il rappelle alors le rôle de la loi « fixer, par de grandes vues, les maximes générales du droit ; d’établir des principes féconds en conséquences, et non de descendre dans le détail des questions qui peuvent naître sur chaque matière » (à lois fixes et générales pour traiter de situations variables et imprévisibles) ; il explique immédiatement l’importance du rôle du magistrat « pénétrés de l’esprit, général des lois, à en diriger l’application », et par extension la réalité de la jurisprudence « regardé comme le vrai supplément de la législation » (à importance des usages, de la doctrine et de la jurisprudence).

     

     

     

  • Le domaine de la loi et du règlement (articles 34 et 37 de la Constitution)

    Article  34 de la Constitution du 4 octobre 1958 :

    - La loi fixe les règles concernant :

    ·         les droits civiques et les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques; la liberté, le pluralisme et l'indépendance des médias; les sujétions imposées par la Défense Nationale aux citoyens en leur personne et en leurs biens ;

    ·         la nationalité, l'état et la capacité des personnes, les régimes matrimoniaux, les successions et libéralités ;

    ·         la détermination des crimes et délits ainsi que les peines qui leur sont applicables ; la procédure pénale ; l'amnistie ; la création de nouveaux ordres de juridiction et le statut des magistrats ;

    ·         l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures ; le régime d'émission de la monnaie.

    La loi fixe également les règles concernant :

    ·         le régime électoral des assemblées parlementaires, des assemblées locales et des instances représentatives des Français établis hors de France ainsi que les conditions d'exercice des mandats électoraux et des fonctions électives des membres des assemblées délibérantes des collectivités territoriales ;

    ·         la création de catégories d'établissements publics ;

    ·         les garanties fondamentales accordées aux fonctionnaires civils et militaires de l'Etat ;

    ·         les nationalisations d'entreprises et les transferts de propriété d'entreprises du secteur public au secteur privé.

    La loi détermine les principes fondamentaux :

    ·         de l'organisation générale de la Défense Nationale ;

    ·         de la libre administration des collectivités territoriales, de leurs compétences et de leurs ressources ;

    ·         de l'enseignement ;

    ·         de la préservation de l'environnement ;

    ·         du régime de la propriété, des droits réels et des obligations civiles et commerciales ;

    ·         du droit du travail, du droit syndical et de la sécurité sociale.

    Les lois de finances déterminent les ressources et les charges de l'Etat dans les conditions et sous les réserves prévues par une loi organique.

    Les lois de financement de la sécurité sociale déterminent les conditions générales de son équilibre financier et, compte tenu de leurs prévisions de recettes, fixent ses objectifs de dépenses, dans les conditions et sous les réserves prévues par une loi organique.

    Des lois de programmation déterminent les objectifs de l'action de l'État.

    Les orientations pluriannuelles des finances publiques sont définies par des lois de programmation. Elles s'inscrivent dans l'objectif d'équilibre des comptes des administrations publiques.

    Les dispositions du présent article pourront être précisées et complétées par une loi organique.

    Article 37 de la Constitution du 4 octobre 1958 :

     - Les matières autres que celles qui sont du domaine de la loi ont un caractère réglementaire.

    Les textes de forme législative intervenus en ces matières peuvent être modifiés par décrets pris après avis du Conseil d'Etat. Ceux de ces textes qui interviendraient après l'entrée en vigueur de la présente Constitution ne pourront être modifiés par décret que si le Conseil Constitutionnel a déclaré qu'ils ont un caractère réglementaire en vertu de l'alinéa précédent.

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    Le domaine de la loi au sens formel :   d’après son origine (critère organique), c’est-à-dire le Parlement.
    La loi est votée par le Parlement.

    Le domaine de la loi au sens matériel :   d’après son contenu.
    La loi fixe les règles concernant … ainsi que les règles concernant … détermine les principes fondamentaux …

    Ces deux articles de la Constitution du 4 octobre 1958 exposent le domaine de la loi, en utilisant les deux critères. En premier lieu, ces articles utilisent le critère formel en indiquant que la loi est votée par le Parlement, par opposition aux règlements émis par une autorité administrative. Puis, ces articles utilisent le critère formel par une énumération des matières réservées aux parlementaires et celles au domaine réglementaire.

    Pour distinguer les deux domaines (législatif – réglementaire), il suffit de se reporter au domaine de la loi ; puisque ce qui n’est pas du domaine de la loi relève du domaine règlementaire. Le règlement est un texte édictant des règles de droit, émanant du pouvoir exécutif et des autorités administratives.

    Caractéristiques du domaine de la loi :
    - le domaine de la loi est limité ;
    - c’est une compétence exceptionnelle ;
    - existence d’une liste exhaustive ;
    - règles et principes fondamentaux (droits et devoirs de l’Homme et du Citoyens – Organisation institutionnelle – programmation et organisation des finances).

    Caractéristiques du domaine réglementaire :
    - c’est un domaine par défaut (ce qui ne relève pas de la loi) ;
    - c’est donc une compétence de principe ;
    - textes autonomes (règlement autonome), textes d’application (décret d’application).

     

  • La fonction de policier corrigée par Secret Story OU de l'oubli de la déontologie policière

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    Lors du lancement de l’émission de télé-réalité « Secret Story » sur TF1, on a pu être rapidement étonné par le « secret » d’un candidat. Mlle Nelly VALLADE, « Laly » dans le jeu,  porte comme secret d’être policière et strip-teaseuse. A cette annonce, on est évidemment surpris puisque les policiers, comme plusieurs fonctions publiques à l’image des magistrats, sont tenus à un devoir de réserve. Peut-on alors être policier et accomplir une autre fonction telle que mannequin, strip-teaseuse, etc. ? Sans me plonger dans la biographie de cette personne, il n’est pas surprenant d’apprendre que la candidate avait fait l’objet d’une procédure de licenciement.

     

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    Il apparaît évident que la fonction de policier n’est pas compatible avec un emploi de mannequin ou une participation à un jeu de télé-réalité…. Le fonctionnaire de police doit honoré son uniforme ainsi que sa représentation. Bien sûr, il est libre de ses opinions et de s’exprimer mais dans les limites du droit de réserve et des règles de discrétion et de secret professionnel auquel il est tenu. Plusieurs dispositions du Code de Déontologie de la Police Nationale encadrent cette situation.

     

    Voici donc le Code de Déontologie de la Police Nationale composé de 19 articles énonçant les règles et les devoirs qui régissent la fonction de policier. Parmi les règles principales, on peut rappeler que le policier agit pour et dans le respect des droits et des libertés fondamentales…. (les dispositions surlignées visent le cas pratique de la situation de Mlle Nelly VALLADE).         
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    CODE DE DEONTOLOGIE DE

     LA

    POLICE NATIONALE

     

    TITRE PRELIMINAIRE
    Article 1er

     

       La police nationale concourt, sur l'ensemble du territoire, à la garantie des libertés et à la défense des institutions de la République, au maintien de la paix et de l'ordre public et à la protection des personnes et des biens.

     

    Article 2

     

       La police nationale s'acquitte de ses missions dans le respect de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, de la Constitution, des conventions internationales et des lois.

     

    Article 3

     

       La police nationale est ouverte à tout citoyen français satisfaisant aux conditions fixées par les lois et règlements.

     

    Article 4

     

       La police nationale est organisée hiérarchiquement. Sous réserve des règles posées par le code de procédure pénale en ce qui concerne les missions de police judiciaire, elle est placée sous l'autorité du ministre de l'intérieur.

     

    Article 5

     

       Le présent code de déontologie s'applique aux fonctionnaires de la police nationale et aux personnes légalement appelées à participer à ses missions.

     

    Article 6

     

       Tout manquement aux devoirs définis par le présent code expose son auteur à une sanction disciplinaire, sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale.

     

    TITRE Ier : DEVOIRS GENERAUX
    DES
    FONCTIONNAIRES DE LA POLICE NATIONALE

     

    Article 7

     

       Le fonctionnaire de la police nationale est loyal envers les institutions républicaines. Il est intègre et impartial ; il ne se départit de sa dignité en aucune circonstance.
       Placé au service du public, le fonctionnaire de police se comporte envers celui-ci d'une manière exemplaire.

       Il a le respect absolu des personnes, quelles que soient leur nationalité ou leur origine, leur condition sociale ou leurs convictions politiques, religieuses ou philosophiques.

     

    Article 8

     

       Le fonctionnaire de la police nationale est tenu, même lorsqu'il n'est pas en service, d'intervenir de sa propre initiative pour porter assistance à toute personne en danger, pour prévenir ou réprimer tout acte de nature à troubler l'ordre public et protéger l'individu et la collectivité contre les atteintes aux personnes et aux biens.

     

    Article 9

     

       Lorsqu'il est autorisé par la loi à utiliser la force et, en particulier, à se servir de ses armes, le fonctionnaire de police ne peut en faire qu'un usage strictement nécessaire et proportionné au but à atteindre.

     

    Article 10

     

       Toute personne appréhendée est placée sous la responsabilité et la protection de la police ; elle ne doit subir, de la part des fonctionnaires de police ou de tiers, aucune violence ni aucun traitement inhumain ou dégradant.
       Le fonctionnaire de police qui serait témoin d'agissements prohibés par le présent article engage sa responsabilité disciplinaire s'il n'entreprend rien pour les faire cesser ou néglige de les porter à la connaissance de l'autorité compétente.
       Le fonctionnaire de police ayant la garde d'une personne dont l'état nécessite des soins spéciaux doit faire appel au personnel médical et, le cas échéant, prendre des mesures pour protéger la vie et la santé de cette personne.

     

    Article 11

     

       Les fonctionnaires de police peuvent s'exprimer librement dans les limites résultant de l'obligation de réserve à laquelle ils sont tenus et des règles relatives à la discrétion et au secret professionnels.

     

    Article 12

     

       Le ministre de l'intérieur défend les fonctionnaires de la police nationale contre les menaces, les violences, les voies de fait, les injures, diffamations ou outrages dont ils sont victimes dans l'exercice ou à l'occasion de leurs fonctions.

     

    TITRE II : DROITS ET DEVOIRS RESPECTIFS
    DES
    FONCTIONNAIRES DE POLICE ET
    DES AUTORITES
    DE COMMANDEMENT

     

    Article 13

     

       L'autorité investie du pouvoir hiérarchique exerce les fonctions de commandement. A ce titre, elle prend les décisions et les fait appliquer ; elle les traduit par des ordres qui doivent être précis et assortis des explications nécessaires à leur bonne exécution.

     

    Article 14

     

       L'autorité de commandement est responsable des ordres qu'elle donne, de leur exécution et de leurs conséquences. Lorsqu'elle charge un de ses subordonnés d'agir en ses lieu et place, sa responsabilité demeure entière et s'étend aux actes que le subordonné accomplit régulièrement dans le cadre de ses fonctions et des ordres reçus.
       Le fonctionnaire de police doit exécuter loyalement les ordres qui lui sont donnés par l'autorité de commandement. Il est responsable de leur exécution ou des conséquences de leur inexécution.

     

    Article 15

     

       L'autorité de commandement transmet ses ordres par la voie hiérarchique. Si l'urgence ne permet pas de suivre cette voie, les échelons intermédiaires en sont informés sans délai.

     

    Article 16

     

       Hors le cas de réquisition, aucun ordre ne peut être donné à un fonctionnaire de police qui ne relève pas de l'autorité fonctionnelle de son auteur, si ce n'est pour faire appliquer les règles générales de la discipline.

     

    Article 17

     

       Le subordonné est tenu de se conformer aux instructions de l'autorité, sauf dans le cas où l'ordre donné est manifestement illégal et de nature à compromettre gravement un intérêt public. Si le subordonné croit se trouver en présence d'un tel ordre, il a le devoir de faire part de ses objections à l'autorité qui l'a donné, en indiquant expressément la signification illégale qu'il attache à l'ordre litigieux.
       Si l'ordre est maintenu et si, malgré les explications ou l'interprétation qui lui en ont été données, le subordonné persiste dans sa contestation, il en réfère à la première autorité supérieure qu'il a la possibilité de joindre. Il doit être pris acte de son opposition.
       Tout refus d'exécuter un ordre qui ne répondrait pas aux conditions ci-dessus engage la responsabilité de l'intéressé.

     

    Article 18

     

       Tout fonctionnaire de police a le devoir de rendre compte à l'autorité de commandement de l'exécution des missions qu'il en a reçues, ou, le cas échéant, des raisons qui ont rendu leur exécution impossible.

     

    TITRE III : DU CONTROLE
    DE LA POLICE

     

    Article 19

     

    (Décret nº 2001-709 du 31 juillet 2001 art. 5 Journal Officiel du 3 août 2001)

     

    Outre le contrôle de la chambre de l'instruction, qui s'impose à eux lorsqu'ils accomplissent des actes de police judiciaire, les personnels de la police nationale et les autorités administratives qui les commandent sont soumis au contrôle hiérarchique et au contrôle de l'inspection générale de l'administration et, s'agissant des seuls personnels de la police nationale, également à celui de l'inspection générale de la police nationale.

     

  • Assistance aux victimes

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    Alors que les débats se poursuivent sur la place de la victime dans le procès pénal.... où les positions divergent:

    - volonté d'attribuer une place à la victime dans le procès pénal ;

    - peur de voir la victime intervenir dans le procès pénal en indiquant les risques de dérives à l'image de la justice américaine ;

    .....

    Il semble nécessaire de rappeler que les victimes d'infractions possèdent des droits, dont le premier est le droit de déposer plainte ; puis d'être assistée d'un avocat, d'obtenir une aide juridictionnelle, ainsi que l'indemnisation de ses dommages.

    Pour répondre aux questions qui se posent à vous, vous pouvez consulter le guide mis en ligne par le Ministère de la Justice: http://www.vos-droits.justice.gouv.fr/art_pix/guide_victime.pdf   ou consulter le site internet du Ministère de la Justice sur l'aide aux victimes: http://www.justice.gouv.fr/index.php?rubrique=10044 

    Il faut aussi souligner le travail fondamental des associations d'aide aux victimes qui offrent une écoute, une aide psychologique et une aide juridique aux victimes. En cas de besoin, n'hésitez pas à prendre contact avec une des associations de votre commune.  

    De plus, un numéro de téléphone "08 VICTIMES" (prix d'un appel local 7jours sur 7, de 9h à 21h) est à votre disposition :

     08 842 846 37

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  • Le droit au respect à la vie privée ne fait pas obstacle à la lutte contre le terrorisme

    Il me semble qu'il est important de rappeler que la lutte contre le terrorisme ne justifie pas des atteintes à la vie privée. Il est urgent de trouver une saine conciliation entre les deux impératifs: lutte contre le terrorisme (et la criminalité) et respect des libertés et droits fondamentaux. La déclaration du Secrétaire Général du Conseil de l'Europe Terry Davis de ce 28 janvier 2007 invite les Etats à ne pas céder à la panique terroriste. Il ne faut pas oublier, comme le souligne la construction entamée dans le cadre de l'Union Européenne, que l'espace de sécurité s'entend aussi d'un espace de liberté et de justice.....


    Le droit au respect à la vie privée ne fait pas obstacle à la lutte contre le terrorisme

    Déclaration de Terry Davis, Secrétaire Général du Conseil de l'Europe, à l’occasion de la Journée de la protection des données

    Strasbourg, 28.01.2007 – Tous les gouvernements ont le devoir de protéger leurs citoyens de la menace terroriste, mais ils doivent le faire dans la légalité, avec intelligence et efficacité. La Convention européenne des Droits de l'Homme garantit le droit au respect de la vie privée, et donne aux autorités un pouvoir d’ingérence lorsque la sécurité nationale et la sûreté publique sont menacées. En même temps, les limitations de ce type doivent être nécessaires, adéquates, proportionnées et prévues par la loi.

    Je m’inquiète de ce que certaines dispositions récentes concernant l’échange de données introduites sous la pression des Etats-Unis d’Amérique ne remplissent pas ces critères, notamment pour ce qui est des données personnelles portant sur l’origine raciale et ethnique, les opinions politiques, les convictions religieuses, la santé et la vie sexuelle.

    Le Conseil de l'Europe est disposé à conseiller l’ensemble de ses Etats membres, qu’ils soient membres ou non de l’Union européenne, à conclure des accords satisfaisants, qui non seulement permettront une coopération efficace dans la lutte contre le terrorisme, mais respecteront aussi la Convention européenne des Droits de l'Homme et éviteront de faire l’objet de requêtes devant la Cour de Strasbourg.

    Je tiens à remercier l’Union européenne, en particulier le Commissaire Franco Frattini, pour leur soutien précieux apporté à la « Journée sur la protection des données » célébrée le 28 janvier par le Conseil de l’Europe pour marquer la signature de la Convention pour la protection des personnes à l’égard du traitement automatisé des données à caractère personnel.

    Communiqué de presse - 069(2007)

    Division de la Presse du Conseil de l’Europe
    Tel: +33 (0)3 88 41 25 60
    Fax:+33 (0)3 88 41 39 11
    pressunit@coe.int
    www.coe.int/press

  • La Justice face aux caméras

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    Vous avez peut-être suivi l'émission "Le Droit de Savoir" diffusé sur TF1 mardi 9 janvier intitulé "Les Français face à la loi : enquête au coeur du palais de justice".

    (Descriptif de l'émission: Conduites sans permis, alcool au volant, violences conjugales, agressions sexuelles, trafics de drogue : une équipe du magazine s'est immergée dans le quotidien de la justice pénale, côté cour. A chaque étape, l'enjeu est clair : la condamnation, la privation de liberté, l'amende ou la relaxe. De l'interrogatoire devant le juge d'instruction à l'audience de jugement, les caméras ont filmé les décisions des magistrats mais aussi ce qu'attendent ou espèret les victimes, les prévenus et les avocats. Du côté des familles, c'est le juge aux affaires familiales qui décide des conditions du divorce, de la garde des enfants, du montant de la pension alimentaire. Marina Ladous a mené l'enquête au coeur du Palais de justice de Tarascon, s'intéressant à ces hommes et ces femmes qui représentent la loi).

    L'introduction de ces caméras dans la procédure pénale de nos tribunaux permet de donner une vraie vision sur la Justice: son fonctionnement, son déroulement, ses acteurs... parfois très loin des séries télévisées.

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    Dans le même temps puisqu'à quelques jours d'intervalles, M6 propose une émission assez similaire dans son émission "Zone Interdite" ce soir intitulée "Profession juge : enquête sur la justice au quotidien".

    (Descriptif de l'émission: Pauvreté, chômage, violence, détresse, tous les maux de la société trouvent un écho dans le bureau des juges. Quelle que soit la raison de leur audition, les juges ont entre leurs mains le sort des prévenus. Comment assument-ils cette responsabilité ? Au sommaire : "Juge des enfants : comment rétablir l'autorité ?". Au tribunal pour enfants de Créteil, comme ailleurs en France, seuls 10% des mineurs présentés aux juges sont placés en détention. Forts d'un sentiment d'impunité, ils sont souvent multirécidivistes. Comment un juge, à l'image de Marie-Ange Leprince, vice-présidente du tribunal, peut-il réussir à faire respecter la loi là où famille et école ont échoué ? "Le quotidien d'un juge d'instruction". Un aperçu d'une journée-marathon de Thierry Lefevre, juge d'instruction et président du tribunal correctionnel, en poste à Verdun depuis 4 ans).

    Après les lourdes critiques faites à la Justice suite à l'Affaire d'Outreau, ces émissions permettent de nous donner la réalité du travail des magistrats: les affaires dont ils ont la charge, leur quotidien, leurs difficiles décisions, ...

     

     

  • L'Appel des 115

    - Appel des 115 qui sera adressé à l’ensemble des Parlementaires -

    Criminalité, délinquance, justice, connaître pour agir


    Nous, chercheurs, enseignants-chercheurs et jeunes chercheurs en formation, de disciplines
    très diverses, acteurs de la Justice pénale de toutes professions, personnels soignants, militants associatifs dans le champ pénal, demandons aux pouvoirs publics de créer une structure multidisciplinaire d’études et de recherches sur les infractions pénales, leur prévention, leur sanction et leur réparation.

    Cette structure dont le cadre administratif reste à imaginer doit s’inspirer des expériences
    étrangères en la matière et chercher à rassembler, dans une même entité, des
    représentants des sciences du droit, des sciences de la société, des sciences médicales et du
    psychisme, et de la philosophie, chercheurs professionnels mais aussi « praticiens » intéressés
    par la démarche scientifique. Par son existence, elle doit partout favoriser cette approche
    multidisciplinaire du champ pénal qui manque tant à notre pays.

    Nous pensons que l’approche multidisciplinaire est la seule capable d‘éclairer le débat public
    sur la question pénale, au-delà de l’émotion, des souffrances, mais aussi des passions idéologiques, et d’apporter une contribution significative à la construction de politiques pénales, dépassant esprit de système et démagogie populiste.

    Les objectifs de cette structure sont les suivants :

    1. - Elle entreprend, développe, encourage, à son initiative ou à la demande des pouvoirs
    publics, tous travaux de recherches ayant pour objet l’étude des infractions pénales et des
    réponses apportées (prévention, aide aux victimes, poursuites à l’égard des auteurs,
    alternatives aux poursuites, prononcé des mesures et des sanctions, modalités d’exécution des
    unes et des autres) et ce dans toutes les disciplines concernées.

    2. - Elle évalue, effectue ou fait effectuer toutes recherches utiles à la connaissance scientifique, multidisciplinaire, du champ pénal et à sa contribution à la sécurité publique et à l’amélioration du fonctionnement des institutions pénales.

    3. - Elle recueille, centralise et valorise l’ensemble des travaux tant français qu’étrangers
    relevant de son champ d’activité par la création et le développement d’un centre de
    documentation de grande envergure, mis en réseau avec les centres existants. Elle élabore des
    « synthèses de connaissances » et tient notamment le Gouvernement, le Parlement et les pouvoirs publics informés des connaissances acquises.

    4. - Elle apporte son concours à la formation à la recherche et par la recherche dans les
    domaines de sa compétence.

    5. - Elle participe à l’information de l’ensemble des citoyens dans les domaines de sa
    compétence.

    6. - Elle participe, au niveau international, à la diffusion des travaux français du champ et
    au développement de l’information en favorisant l’usage de la langue française.

    7. - Elle établit chaque année un rapport, largement diffusé, sur son activité, sur les
    résultats des travaux qu’elle a réalisés ou fait réaliser et formule des propositions.

    Sur le plan administratif, différentes solutions sont à envisager et à évaluer à l’aune de
    deux critères, l’indépendance intellectuelle et l’efficacité à atteindre les objectifs définis :
    rattachement au Premier Ministre (auprès du nouveau Centre d’analyse stratégique ?), ou
    de plusieurs tutelles (Ministère de la Justice, Ministre de l’Intérieur et de l’Aménagement
    du Territoire, Ministère de la Santé et de la solidarité…), voire du seul Ministère de
    l’Education nationale et de l’enseignement supérieur et de la recherche. Cela dépend,
    naturellement, de l’évolution des structures existantes et des complémentarités à construire.
    Par ailleurs, l’entité doit avoir des liens très étroits avec l’enseignement supérieur, tant
    universitaire que professionnel, sans oublier l’enseignement au collège et au lycée.

    C’est dans cet esprit d’ouverture que nous prendrons contact, dans les semaines à venir, avec
    les pouvoirs publics et l’ensemble des partis politiques afin que cette structure puisse voir
    le jour sans tarder.


    Paris, le 25 février 2006.

     

    Sur l'initiative de Pierre V. Tournier, un groupe de personnes dont le nombre s'étend de jour en jour,  lance un appel à signature depuis le 25 février 2006 concernant la création d'une structure multidisciplinaire d'études et de recherches sur les infractions pénales, leur prévention, leur sanction et leur réparation. L'Appel des 115 renvoie aux 115 premiers signataires bien qu'aujourd'hui plus de 600 signatures dont une cinquante de personnes morales les aient rejoins. Les signataires connaissent des horizons parfois divers: si l'on retrouve de nombreux universitaires en droit pénal (chercheurs, professeurs ou étudiants); on remarque aussi que l'on retrouve des universitaires venant d'autres domaines (philosophie, sociologie...), un grand nombre de professions concernées: magistrats, avocats, policiers, fonctionnaires du service pénitentiaire, membre d'association d'aide aux victimes mais pas seulement (médecin, historien, politologue, etc). De nombreux élus et responsables politiques ont aussi signé cet appel (Noël Mamère, Jack Lang...). Parmi les personnes morales, on peut citer l'Association française de criminologie (AFC). Les objectifs poursuivis par cette structure pourraient permettre une meilleure lisibilité de la question pénale.

     

    Les signatures (nom, prénom, profession, fonctions et localité) sont à adresser  à :

    pierre-victor.tournier@wanadoo.fr

     

    Voir aussi:  pour des renseignements complémentaires sur le but de cet appel: http://champpenal.revues.org/document520.html 

    pour une liste assez détaillée des signataires: http://histoirepenale.wifeo.com/appel.php

  • Dix ans après l'Appel de Genève!

    L'année dernière, j'avais eu l'occasion de publier le texte de l' "Appel de Genève", où 7 magistrats dénonçaient le 1er Octobre 1996, le manque de moyens dans la lutte contre la criminalité transfrontalière avec principalement le problème des paradis fiscaux --- et proposaient  d'instaurer concrètement un espace judiciaire européen. http://fxrd.blogspirit.com/archive/2005/09/08/l-appel-de-geneve.html

    Le journaliste Denis Robert avait apporter une contribution importante dans le lancement de cet appel, suivi de la sortie de son livre "La justice ou le chaos".

    Nous sommes 10 ans après cet appel....   Et le journaliste Denis Robert rappelle les conditions de préparation et de signature de l'Appel en 1996  --- et propose de faire un état des avancées en matière de lutte contre la criminalité transfrontalière en Europe: 

    "   .............

    Grâce à l’appel de Genève, il s’est en effet créé un mandat d’arrêt européen, ou cette structure imaginée par les politiques Eurojust, embryon de justice européenne. Grâce à l’appel, le Gafi a vu le jour et nous délivre à intervalles réguliers le hit parade (inutile au fond) des pays les plus pourris de la planète. Attac ou l’association Transparency International ont relayé certaines de nos idées. Bien sûr, mais...

    Dans la série d’entretiens avec les magistrats, qui avaient donné la matière première de l’appel de Genève, Garzon comparait la justice de son pays à un mammouth, et les criminels financiers à des léopards (6). Pour lui, la justice était lente et lourde comme ces vieux mammouths. Le léopard bondit, file, se repaît et se repose. Le mammouth s’essouffle, se croit le plus fort, sait qu’il va crever et cherche sans doute à se convaincre du contraire. La mort du mammouth, s’il ne parvient pas à s’adapter, paraît inéluctable.

    Nous devons aujourd’hui, dix ans après Genève, nous interroger sans chercher à biaiser : y a-t-il une justice européenne ? Les criminels financiers sont-ils moins en sécurité ? Les juges communiquent-ils mieux entre eux ? La part d’argent noir est-elle en diminution ? Fabrique-t-on moins de pauvreté dans nos pays développés ? Toutes ces questions sont intimement liées. A chacune d’elles, la simple perception du réel contraint de répondre, sans aucune hésitation, par la négative   (je souligne). En dehors de quelques améliorations minimes dans la transmission des commissions rogatoires internationales qui tiennent surtout aux rapports personnels entre magistrats, aucun satisfecit n’est possible.

    .........

    Un nouveau phénomène émerge depuis quelques années : la fatigue, la démission ou la mise en disponibilité de nombreux magistrats chargés d’affaires financières en Europe.

    La justice européenne n’existe pas.  (je souligne)  C’est vrai pour Bruxelles, mais aussi pour chacun des pays membres de l’Union européenne. Elle est au mieux un sujet d’embarras pour les députés ou les ministres de la justice et des affaires étrangères. Elle est le dernier souci des eurodéputés et des présidents de commissions. Elle ne sert, à intervalles réguliers, qu’à des effets d’annonce (7).

    ........

    Nous assistons sans broncher à un véritable braquage de nos économies.

    ........

    Dix ans se sont écoulés. Bon anniversaire, Messieurs.

    Denis Robert, le 1er octobre 2006      "  

     Pour lire l'article de Denis Robert  en entier:  http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=14003#commentaire173516 

     

    M. Denis Robert dresse donc un constat assez négatif sur les suites de l'appel lancé par les 7 magistrats. Il ne fait pas de doute que de nombreux progrès doivent encore être réalisés...

    Eurojust, Europol, OLAF, RJE, Magistrats de liaison, Mandat d'arrêt européen ... et peut-être un jour un Procureur Européen et une Cour Pénale Européenne! Il ne faut pas non plus minimiser les avancées connues en matière pénale depuis une dizaine d'années, et notamment dans le cadre de l'Union Européenne à la suite du Conseil de Tampere tenu en Octobre 1999. D'ailleurs, si les politiques peuvent souvent être critiqués pour leur manque de volonté dans l'évolution dans ce domaine sensible directement lié à la souveraineté des Etats;  NOUS, citoyens, devons aussi prendre nos responsabilités: le refus de la Constitution Européenne a aussi temporairement exclu des avancées importantes pour la coopération pénale --- Constitution qui fixait un cadre juridique commun pour la construction d'un véritable espace de liberté de sécurité et de justice, en favorisant l'adoption des instruments par une simplification, aurait dû permettre d'étendre les compétences d'Europol et d'Eurojust en donnant plus de latitude au législateur, le renforcement des compétences de la Cour de Justice des Communautés Européennes ......

  • M. SARKOZY dénonce une "démission" de la justice: ou quand on utilise les appréhensions de l'opinion publique dans sa campagne présidentielle

    Nicolas SARKOZY s'est exprimé en matière de sécurité en faisant une comparaison entre le bilan national caractérisé par une baisse de la délinquance, et la situation "inacceptable" en Seine-Saint-Denis. Il a indiqué l'affectation de 3 000 policiers supplémentaires. Cependant, il a donné comme explication possible de la situation en critiquant la justice. Voici la phrase qui crée la polémique actuelle:

    "Depuis le début de l'année, le nombre d'écroués dans le département est en baisse de 15,5 %. Cela témoigne d'une forme de démission. J'aimerais que l'on m'explique comment on empêche un délinquant de récidiver si l'on n'a pas le courage de le mettre en prison."

    Le terme "démission" a largement suscité la révolte côté magistrats. Guy Canivet, premier président de la Cour de cassation, sera reçu à l'Elysée. Tous dénoncent une nouvelle atteinte à l'indépendance de la justice.

    Je voudrai aborder cette polémique par deux observations :

    ----- Je pense sincèrement que l'opinion publique pense profondément la même chose. Selon moi, une grande partie de l'opinion publique comprend mal pourquoi de nombreux délinquants ne se voient pas condamnés à un emprisonnement ferme, ne purgent pas leur peine, voient leur peine amnistiée.... Le Ministre de l'Intérieur se trouve en pleine campagne présidentielle, et utilise le thème de la sécurité dans le débat politique.

    ------ Cependant, je pense que ce n'est ni le rôle ni une déclaration à faire pour un Ministre de l'Intérieur. Si il reprend une idée assez commune auprès de nombreux citoyens; il n'exprime pas une observation juste dans un domaine aussi complexe. Pour m'expliquer, je ne donnerai que quelques exemples:

    - d'une part, il fait abstraction du principe d'individualisation de la peine ou de l'utilisation des peines alternatives à l'emprisonnement, des mécanismes de réduction de peines....;

    - d'autre part, y-a-t-il des places en milieu carcéral, quand on sait que certains établissements sont occupés à 120 ou 140%;

    - de plus, la justice réclame chaque année des moyens humains, administratifs et financiers supplémentaires.....;

    - enfin, l'exemple le plus ironique en la matière, porte sur les amnisties annuelles .... qui dépendent uniquement du pouvoir du chef de l'Etat!

    Il est certain que le Ministre de l'Intérieur connaît l'ampleur du sujet et la complexité du débat en la matière. Il joue le jeu de la campagne présidentielle avec des déclarations percutantes. Cependant, je ne suis évidemment pas en accord avec cette déclaration. Donnons les moyens à la justice de faire son travail... et à ce moment là, il sera permi de critiquer. Certes, il y a des dysfonctionnements, comme l'affaire d'Outreau symbolise; malheureusement, je pense personnellement que nombreux dysfonctionnements résultent  du manque de moyens que de la démission de la justice!

  • Risque d'incompréhension populaire ou une justice à part

    Je ne donnerai pas d'avis sur ces "affaires" car tous les avis ont été exposés pour chaque affaire. Je souhaite simplement mettre ces deux "affaires" en parallèle, ce qui pourrait susciter une certaine incompréhension des citoyens.

    medium_t-burgaud_afp.jpg- 1er cas: l'affaire des acquittés d'Outreau; avec la décision de l'inspection générale des services judiciaires qui indique que les magistrats en charge de l'affaire et notamment le juge Burgaud n'ont commis aucune faute pouvant recevoir une qualification disciplinaire, bien que reconnaissant le défaut majeur d'avoir conduit une instruction essentiellement à charge. Notons que les acquités, comme on pouvait s'y attendre, ont appris avec colère cette décision. On parle déjà de réformer la responsabilité du juge pour non-respect des règles du procès pénal. Reste encore la possibilité pour le Ministre de la Justice de saisir le Conseil Supérieur de la Magistrature.

     

     

     

    medium_arton568.jpg - 2ème cas:  l'affaire Clearstream; où l'inspection générale des services judiciaires a été saisie car le juge Van Ruymbeck a reconnu avoir rencontré - hors procédure - Jean-Louis Gergorin, ancien dirigeant du groupe EADS; pour pouvoir "obtenir" les courriers anonymes. Or, le juge d'instruction doit agir en toute transparence et porter tout acte de procédure dans un procès verbal, l'interdisant donc toute rencontre secrète avec des témoins. Le juge Van Ruymbeck est très largement soutenu, notamment par plusieurs avocats et hauts magistrats (tel que le juge Thiel). Cependant, il semble que cette rencontre pourrait entrainer une sanction disciplinaire.

    Alors que dans cette première affaire, la pression citoyenne réclamait une sanction du fait de l'instruction très critiquée menée par le juge Burgaud, c'est à l'encontre du juge Van Ruymbeck que des sanctions disciplinaires pourraient être infligées alors que son intégrité est reconnue de tous. Le risque d'incompréhension voire d'injustice pourrait alors grandir, à l'encontre d'une Justice subissant déjà nombreuses critiques.